Déclaration du Frère Pierre de Jean Olivi avant sa mort
Source : Castet 1680, t. 2, pp. 328.
(1) Je dis premièrement que l’abdication de tout droit temporel, et l’usage pauvre sont de l’essence de notre vie Evangélique, et j’entends par l’usage pauvre celui qui toutes circonstances pesées sera estimé pencher plus à la pauvreté qu’à l’abondance.
(2) En second lieu, je soutiens que c’est un péché mortel, duquel l’ignorance crasse et affectée n’excuse pas, que de défendre avec opiniâtreté les transgressions de la pauvreté, et les imperfections contre la Règle, disant qu’elle sont bonnes; ou de contraindre les Religieux à les pratiquer, et persécuter ceux qui veulent observer la Règle dans toute sa pureté 1.
(3) Troisièmement, je dis qu’il est plus mal fait d’introduire ces relachements dans le corps de l’Ordre, que d’y attirer seulement quelque particulier, parce que de la première façon le mal s’étend davantage; que les défauts qui tirent à conséquence pour s’introduire, et pour s’établir sont moins tolérables que ceux qui se peuvent ôter facilement; et que les publics sont plus criminels que les secrets à cause du scandale qu’ils donnent.
(4) En quatrième lieu, je crois que les excès notables dans les bâtiments, soit pour la matière, soit pour la curiosité, pour lesquels on fait des quêtes importunes, sont très-dangereux; particulièrement pour ceux qui les veulent défendre, et obliger les autres d’y contribuer, car ils tendent à la destruction de la pauvreté, et sont de longue durée.
(5) En cinquièment lieu, je dis que c’est contre la pureté de la Règle de plaider pour les funerailles et pour les legs pieux; car encore que cela se fasse par des amis spirituels, si toutefois les Religieux les y poussent, et leur fournissent les frais, et les écritures, quoique cela évite le scandale, néanmoins c’est toujours une tromperie cachée, et une impureté pailliée; je dis le même de ceux qui procurent des revenus, ou des provisions réglées pour chaque année, prévenant les nécessités avec trop de soin.
(6) En sixième lieu, je soutiens que c’est une folie, une erreur, et un blasphème contre la Règle de dire qu’il nous est permis de porter des habites prétieux, d’aller chaussés, de se servir des chevaux, et de vivre avec autant d’abondance, et de commidité que si nous étions des Chanoines réguliers.
(7) En septième lieu, je dis que procurer des sépultures avec cette avidité de lucre que s’il n’y avait rien à gagner on ne s’en mettrait pas en peine et faire instituer des obits dimininue beaucoup de la perfection de notre état.
(8) Enfin, je crois que nos Religieux qui sont élevés à l’Episcopat doivent observer la Règle qu’ils ont vouée, autant que ce nouvel état le leur peut permettre.
Saint François avait déclaré ceci au Pape Honorius II, concernant le chapitre 10 de la Règle : “Viendra un jour où les Ministres et les prélats feront beaucoup souffrir ceux qui voudront observer cette règle à la lettre.” ↩︎