Révélations de Jésus-Christ au Capucin Jean de Médina
Source : Annales des Frères Mineurs Capucins, Caluze 1675, t. 1, pp. 392-393, 395-396
Mon fils, continue Jésus-Christ, dans un troisième article des ses révélations, je veux que tu sache encore que je demande principalement des enfants de cet Ordre une confiance particulière de mes faveurs envers eux, en sorte que me seront fort chers ceux-là qui jettent toute leur espérance et leur pensées en moi et qui dépendent entièrement de ma providence. Je les aime, je les entretiens, et je les embrasse, comme mes enfants plus aimés.
Je souffre à regret au contraire que plusieurs frères des cette congrégation, qui professent les conseils évangéliques, et qui doivent dépendre de ma Providence, par l’engagement de leur institut, s’en défient de sorte, et méprisent de manière les avis de leur Père saint François, qui les exhortait de mettre en moi toutes leurs pensées, que comme si je n’avais pas soin d’eux, ils se pourvoient de nourriture dedans leurs voyages, amassent sous un faux prétexte de longues provisions de choses, et font sans fidélité plusieurs choses semblables, qui éloignent d’eux les faveurs de ma Providence, quoi qu’ils dussent se souvenir d’une chose fort vraie, que personne qui se confie parfaitement à mes bontées ne manque jamais des choses plus nécessaires à la poursuite de sont salut, et à l’entretien de sa vie.
Que ceux donc qui me servent dans cette Règle, apprennent que je les ai dépouillés de tous les biens, et que je les ai appellés à une extrême pauvreté de toutes choses, pour montrer en eux les richesses de mes libéralités et de ma Providence, et pour les rendre plus dépendants de mes bontés infinies. Qu’il tâchent donc seulement d’être fidèles observateurs de leur Règle, et qu’ils ne doutent jamais de ma Providence, puisque moi, qui nourris les oiseaux du ciel et donne des vêtements aux lis des campagnes, comment abandonnerai-je mes enfants qui ont remis en moi tous les soins de leur vie.
Comme Jésus-Christ se plaisait fort, à l’entretien de son serviteur Jean, il poursuit ses révélations, et lui dit : Mon fils, les lois des Constitutions saintes, et difficiles, dont s’explique avec quel esprit, on doit entendre la Règle, et les Conseils de l’Evangile, et pour entendre, par ma seule Bonté, l’Observance plus facile à l’Ordre, lui ont été données de ma pure Miséricorde, comme des remparts assurés, qui l’environnent de tous côtés, et la défendissent des attaques de la chair, et des sens ses plus cruels ennemis.
Je suis fort fâché que quelques Supérieurs de l’Ordre, les violent pour de trop légers sujets, qu’ils se relâchent de leur vigueur, avec trop de facilité, et qu’ils s’en dispensent sans de justes causes.
Je n’approuve pas au contraire, que d’autres, sans avoir égard à la charité de leurs Frères, ni aux règles de la prudence, ou à la conduite de mon esprit, mais plutôt à l’impétuosité de leurs mouvements, les resserrent dans des bornes trop rigoureuses d’une indiscrète austérité.
Je veux donc qu’elles soient gardées par les Supérieurs de l’Ordre, comme de fortes défenses de l’Observance régulière, et observées avec le même esprit, qu’elles ont été données, et qu’ainsi elles entretiennent, et conservent toute la Réforme dans l’éclat, et la sainteté.
… mon Sauveur, ajouta un cinquième article de ses révélations à son serviteur Jean, et lui dit : Mon fils, les Frères de cette Congregation, doivent dépendre absolument de ma volonté, et ne regarder en toutes leurs affaires, que la conduite de mon esprit, en sorte que libres de tout ce qui doit être réservé à mon choix, ils soumettent tous leurs soins, et tous leurs désirs, à l’empire de mes divines volontés.
Ceux qui vivent de sorte, qu’ils commettent à mes ordres leurs personnes, et tous leurs intérêts, et qui attendent de ma conduite tout ce qu’il me plaira, sans inquiétude, soit honneurs, soit affronts, soit tristesses, soit contentements, je les embrasse comme mes plus chers amis, j’en ai des soins tous particuliers, j’accomplis en eux, mes volontés, et je m’y glorifie, sont eux, qui dorment dans mon sein, et qui reposent en moi fort paisiblement.
Mais ceux qui cherchent avec trop d’empressement ces choses, qu’ils devraient attendre de ma Providence, et qui pour les acquérir contre mes volontés, ou recourent à la faveur des hommes, ou y emploient tous leurs soins, ceux-là très-assurément ne peuvent m’être argréables, parce qu’ils s’écartent trop des ordres de mes volontés.
Les Frères donc, qui veulent me servir, et m’obéir plus parfaitement, qu’ils aient soin principalement, d’avoir une âme libre de tous les désirs des choses, et exceptés les vertus de l’âme, et des secours célestes, qui les y conduisent, de ne me demander, ni biens humains, ou temporels, quoi qu’ils paraissent bon, et fort honnêtes, ni charges de prédications, ni même les biens de l’éternité, mais qu’ils laissent tout à ma volonté, et qu’ils aient l’esprit dégagé de sorte de tous les désirs du monde, qu’ils me laissent disposer de toutes choses, selon les lois de ma sagesse, et de mes volontés, et qu’ils reçoivent tout de moi, sans inquiétude, puisque cet Ordre, qui est dans l’état le plus parfait, doit être exempt de ces choses, qui affaiblissent la parfaite espérance, et la véritable charité, dont la nature, et la force sont, qu’excepté l’objet de la gloire divine, elles méprisent tout le reste, comme trop rempli d’imperfections, et de manquements.
… Frère Jean demanda ici à Jésus-Christ, de quelle manière l’Ordre se comporterait d’orénavant, dans l’obéissance qu’il avait rendu jusque là au Maître Général des Frères Mineurs Conventuels, parce que les consciences timides des Frères étaient alors inquiètées, comme d’un scrupule, de l’obéissance principale, que le saint Siège leur ordonnait de rendre au Ministre Général de l’Ordre des Mineurs de l’Observance, et il en reçut cette réponse fort amoureusement :
Mon fils, que les Frères sachent, qu’ils doivent à trois sortes de personnes principalement l’obédience, que leur impose leur Règle, à moi, à qui même, ils promettent d’observer le saint Evangile, au Pape comme au Chef de l’Eglise, et mon Vicaire en terre, à qui ils doivent leurs soumissions, et à leur Père saint François, et à ses Successeurs, comme l’explique la Règle, afin que l’ordre, et la forme de la hiérarchie religieuse soient mieux observées, qui enferment une subordination d’inférieurs à leurs supérieurs.
Pour ce qui regarde les deux premières Personnes, comme les Frères n’en doutent pas, je n’en dirai rien, mon Fils.
Pour la troisième, dont ils ont quelque peine, qu’ils observent cette ordre, que lorsque la Règle leur ordonne d’obéir à saint François, et à ses Successeurs, ils considèrent quels sont ceux, qui succèdent à saint François : sont ceux que j’établis leur Supérieurs, non pas par l’antiquité, ni le cours des années, ni la primauté de l’Ordre, mais par une institution légitime, et principalement de l’observance de la Règle : voilà ceux à qui je prétend, qu’ils rendent leurs obéissances, puisque saint Paul a dit autrefois : Tous ceux qui sont d’Israël, ne sont pas Israëlites, ni ceux qui sont de la race d’Abraham ne sont pas ses fils. Ce que j’ai même enseigné dans mon Evangile, lorsque parlant aux Hébreux, qui se glorifiaient d’être du sang d’Abraham, je leur ai protesté : Que s’ils étaient fils d’Abraham, il devaient en faire les oeuvres.
La crainte donc des Frères, sur ce sujet, est fort inutile, puisque comme ils ont un Chef établi par ma Providence, et confirmé par la puissance du Pape, Vicaire en terre de la Mienne, ils sont obligés de lui obéir, comme au Successeur de saint François.
D’où vient qu’ils chercheraient inutilement d’autres Successeurs, et que leur crainte ne serait que vaine, puisque les Frères de cette Congrégation, et le Chef qui les conduit, doivent être grands observateurs de la Règle, et les enfants légitimes de leur Père saint François, afin qu’ils lui succèdents légitimement, ceux-là comme inférieurs, et ceux-ci comme supérieurs.
Avertis donc le Général, mon Fils, que libre de toute sorte de crainte, il fasse observer seulement ces choses, qui sous mon Autorité sont ordonnées, ou seront établies du Siège Apostolique, et ainsi les Frères observateurs de leur Règle, sous l’obéissance du Pape, et de leur Général, accompliront ma volonté, et celle de leur Père S. François, dont il seront estimés les légitimes enfants.