Chapitre deuxième
(1) Le saint confesseur de Jésus-Christ prescrivant aux Ministres et aux Frères ce qu’ils ont à faire et observer à l’égard de ceux qu’ils reçoivent en l’Ordre, a dit dans la Règle : que les Frères et les Ministres se gardent de se mêler de leurs biens temporels, afin qu’ils aient la liberté d’en disposer selon que le Seigneur le leur inspirera. Néanmoins, s’ils demandaient avis là-dessus, il sera permis aux Ministres de les adresser à quelques personnes craignant Dieu, dont ils puissent suivre les avis pour distribuer leurs biens aux pauvres.
À ce sujet, plusieurs des Frères ont douté et doutent s’il leur est permis, dans le cas où il leur en serait fait don, de recevoir quelque chose des biens de ceux qui entrent dans l’Ordre; s’ils peuvent, sans commettre une faute, les pousser à donner aux personnes et aux couvents; et enfin si, pour cette disposition et distribution de biens, les Ministres ou les Frères peuvent donner quelque avis, à défaut d’autres personnes de bon conseil auxquelles on puisse adresser ceux qui entrent en religion.
Pour nous, nous considérons attentivement que Saint François a eu l’intention, par les paroles citées plus haut, d’éloigner spécialement et totalement les observateurs de sa Règle de toute affection aux biens de ceux qui entrent dans l’Ordre. Ayant fondé ses Frères en une complète pauvreté, il a voulu que de leur côté, la réception à l’Ordre apparût entièrement sainte et pure. Les Frères, d’après lui, uniquement préoccupés de former leurs Novices au service de Dieu, doivent éviter soigneusement le soupçon d’avoir les yeux sur leurs biens temporels.
Appuyé sur ces considérations, nous prononçons que tous, Ministres ou Frères, doivent s’abstenir complètement de toute impulsion qui tendrait à se faire donner quelque chose, comme aussi de toute persuasion, de tous conseils, au sujet de la distribution de ces biens. Pour cette affaire, les postulants doivent être adressés à quelques personnes pieuses d’un autre état et non pas aux Frères, afin qu’il paraisse aux yeux de tous que les Frères sont de soigneux, délicats et parfaits zélateurs de cette salutaire institution de leur père.
(2) Quant à la liberté que la Règle veut qu’on laisse aux nouveaux venus de disposer de leurs biens selon l’inspiration du Seigneur, il ne semble pas qu’il soit interdit pour cela aux Frères, en prenant en considération leurs besoins, aussi bien que les tempéraments ou restrictions proposés dans la déclaration déjà citée; il ne semble pas, disons-nous, qu’il leur soit interdit de recevoir quelque chose de ces biens, si celui qui entre veut librement leur en donner par manière d’aumône, comme aux autres pauvres. Il convient toutefois, que dans l’acceptation de semblables offrandes, les Frères prennent garde que la quantité trop notable des choses ainsi reçues ne puisse donner lieu à quelque fâcheux soupçon contre eux.