Article huitième
(1) La Règle contient encore ces mots : Que les Frères auxquels le Seigneur a fait la grâce de pouvoir travailler, travaillent avec fidélité et dévotion, de telle sorte qu’en bannissant l’oisiveté, ennemie de l’âme, ils n’éteignent pas pour cela en eux l’esprit de la sainte oraison et dévotion. Ces paroles ont parfois servi de prétexte à certains esprits pour taxer méchamment les Frères d’oisiveté et de transgression de leur Règle.
C’est pourquoi, afin de réprimer ces attaques coupables, nous déclarons qu’en considérant ces paroles et la forme de langage par laquelle les Frères sont excités à cet exercice, il ne semble pas que l’intention du fondateur ait été de soumettre ou astreindre au travail manuel ou aux ouvrages du corps ceux qui vaquent à l’étude, à l’Office divin et au ministère sacré. L’exemple de Jésus-Christ et de beaucoup de saints Pères ne nous enseigne-il pas, en effet, que ce travail spirituel est d’autant préférable aux travaux corporels que l’âme et ce qui la touche l’emportent sur le corps.
(2) Quant à ceux qui ne s’adonnent point aux oeuvres spirituelles dont nous venons de parler, à moins qu’ils ne soient employés licitement au service des autres Frères, nous déclarons, pour qu’ils ne vivent pas dans l’oisiveté, que les paroles sus-énoncées s’étendent à eux, à moins encore qu’ils ne fussent hommes d’une si éminente contemplation et oraison qu’on ne put raisonnablement les arracher à un exercice aussi salutaire pour les appliquer à ces sortes de travaux.
Car les Frères, alors même qu’ils ne s’occupent aucunement d’étude ou des ministères sacrés, s’ils aident les autres Frères dans leurs études, ou les servent aux offices et ministères divins, méritent d’être substentés avec ceux-là même qu’ils servent. Nous voyons cette assertion sanctionnée dans la loi fort sage, par laquelle David, ce vaillent combattant, décida que ceux qui marchaient au combat et ceux qui demeuraient aux bagages auraient une part égale au butin.