Chapitre 3
(49) Notre séraphique Père, dont l’esprit était tout catholique et apostolique, et éclairé des lumières célestes, ayant toujours professé la plus profonde vénération pour l’Église Romaine, qu’il regardait comme l’arbitre et la mère de toutes les autres Églises, a ordonné aux clercs, dans sa Règle, de faire l’office selon l’ordre de cette Eglise, et défendu dans son Testament de le changer en aucune manière. Que par conséquent, les Frères, enrôlés sous un seul étendard dans la même milice spirituelle, et appelés à la même fin, observent quant au missel, au bréviaire et au calendrier, les mêmes rites qui sont en usage dans la sainte Eglise Romaine.
(50) Que les Supérieurs veillent aussi à ce que l’on observe exactement le cérémonial composé à notre usage, afin que l’esprit d’uniformité brille dans notre Ordre et que les Frères, dans l’unité des sentiments du coeur et des cérémonies extérieures, louent Dieu, le glorifient et soient pour le monde un sujet d’édification.
(51) Que les clercs et les prêtres qui ne sont pas légitimement empêchés ou dispensés, soient exacts à se rendre au choeur pour l’office divin au premier son de la cloche 1, afin de préparer leur âme au Seigneur. Ils y assisteront avec dévotion, modestie et mortification, pensant, dans le silence et le recueillement, qu’ils sont en la présence de Dieu, pour faire l’office des anges en chantant ses louanges. Et que celui qui sera empêché par quelque nécessité d’assister au choeur, demande auparavant la bénédiction du Supérieur, et s’il ne peut absolument le faire, qu’il présente ensuite son excuse. Et si quelqu’un, contrevenant à l’obéissance, manquait habituellement à l’office divin au choeur, ou s’il était trouvé coupable d’avoir omis plusieurs fois de le réciter, qu’il soit privé de voix active et passive pendant deux ans, et même puni plus gravement à l’arbitre du juge.
(52) On dira l’office divin avec piété, attention, gravité et union de coeur, avec les pauses convenables, et d’une voix ni trop haute ni trop basse, mais médiocre et uniforme. Et pour ne pas mériter le reproche que notre doux Sauveur faisait aux Juifs quand il leur dit : Ce peuple m’honore du bout des lèvres, mais son coeur est loin de moi 2, les Frères s’appliqueront à psalmodier de coeur plus encore que de bouche. Que l’on récite Matines et Laudes à minuit, afin qu’à l’exemple du Roi-Prophète, des Saints et de nos anciens Pères, le Seigneur soit loué dans nos couvents durant le jour et durant la nuit. Et que l’on n’ajoute pas d’autre office au choeur.
(53) Les frères laïcs assisteront au choeur au commencement de Vêpres, de Complies, de Matines, pendant le Te Deum ou le Miserere, et, après avoir fait la préparation commune et commencé l’office au choeur, ils se retireront à l’église, si la chose est facile, pour y réciter les Pater noster prescrits par la Règle. Aux jours de fêtes, ils assisteront aux Vêpres entières. Ils ne manqueront jamais de réciter, pour nos bienfaiteurs défunts, les cinq Offices des morts, qui sont fixés par un ancien usage : le premier, vers la fête de sainte Marie-Madeleine; le second, vers celle de saint Michel, en septembre; le troisième, à la solennité de notre Père saint François; le quatrième, dans l’Avent; le cinquième, à la Septuagésime.
(54) Et comme la célébration du Saint Sacrifice est un acte éminemment divin, nous recommandons aux prêtres de n’y point rechercher la faveur ou la gloire humaine, ni aucun autre avantage temporel, à l’exemple de Jésus-Christ, le Souverain Prêtre, qui, en s’immolant pour nous sur la douloureuse croix, n’a eu en vue aucun intérêt terrestre; mais qu’ils célèbrent avec un coeur pur, simple et détaché, en toute humilité, révérence, foi et dévotion, envisageant uniquement l’honneur de Dieu. Ils auront soin de s’y préparer avec toute la diligence que permet leur fragilité, car plus cette action est sainte entre toutes, plus les irrévérences dont on s’y rendrait coupable doivent exciter l’indignation de Dieu, et il est dit dans les Livres saints : Maudit soit celui qui fait l’oeuvre de Dieu négligemment 3. En conséquence, nous voulons que les Supérieurs reprennent ceux qui célèbrent la Sainte Messe avec négligence et précipitation et qu’ils punissent ceux qui ne se corrigent pas.
(55) Que les religieux, qui n’en sont pas légitimement empêchés, entendent tous les jours la Messe conventuelle 4, et aux jours de fêtes, que les clercs et les laïcs assistent à toutes les Messes qu’ils pourront. Nous exhortons également tous les Frères à assister à ces divins mystères avec un souverain respect, avec une ferveur angélique, l’esprit tout pénétré de la présence de Dieu, s’appliquant à lui offrir avec le prêtre ce Sacrifice auguste et se disposant à y communier au moins spirituellement; et qu’ils n’omettent pas de prier fréquemment, pendant les Messes, offices et oraisons, pour tous les fidèles vivants et défunts, notre séraphique Père nous le recommandant expressément dans sa Règle.
(56) Que les clercs et les laïcs reçoivent fréquemment, même chaque jour, le très saint Corps du Christ, suivant le jugement de leur confesseur. Et que les Supérieurs apportent le plus grand zèle à promouvoir par de fréquentes exhortations, cette pratique aussi sainte que salutaire 5.
(57) Que cet auguste et divin Sacrement, dans lequel notre très doux Sauveur daigne si miséricordieusement habiter sans cesse au milieu de nous, soit conservé dans nos églises 6, conformément aux prescriptions liturgiques 7, et dans un endroit très propre. Les Frères le visiteront fréquemment 8, se tenant en sa présence et le priant comme s’ils étaient déjà dans la céleste patrie avec les saints Anges.
(58) Nous exhortons pareillement les Frères à faire souvent, surtout pendant le Carême, le pieux exercice du Chemin de la Croix et à renouveler tous les premiers vendredis du mois, soit en particulier, soit en commun, leur consécration au Sacré-Coeur de Jésus, consécration qu’on renouvellera chaque année, pour tout l’Ordre, le jour de l’Épiphanie, En outre qu’ils aient une particulière dévotion envers la Très Sainte Vierge Marie, notre très douce Mère, dans le mystère de son Immaculée Conception; c’est pourquoi le samedi, quand les rubriques le permettront, que les prêtres, en vertu du privilège qui nous est accordé, célèbrent la Messe votive de l’Immaculée Conception. Que tous honorent la Vierge Mère de Dieu par la récitation du Rosaire 9, et que chacun fasse son possible pour réciter le petit Office de cette même bienheureuse Vierge.
(59) Persuadés que la sainte oraison est la maitresse de notre vie spirituelle, la mère et la nourrice de toute véritable vertu, afin que l’esprit de dévotion, qu’il faut désirer par-dessus toutes choses, ne vienne pas à s’éteindre ou à s’attiédir en nous, mais au contraire pour que, brûlant sans relâche sur l’autel sacré de notre coeur, il s’y embrase toujours davantage selon le désir de notre Père saint François, nous ordonnons que chaque jour on y consacre deux heures, ou deux exercices spéciaux, un le matin, l’autre le soir, selon les louables coutumes et l’horaire de chaque Province 10. Avant l’oraison du matin on récitera les Litanies des Saints et, avant celle du soir, les Litanies de la bienheureuse Vierge Marie.
(60) Les Frères se rappelleront que la prière n’étant autre chose qu’un entretien de l’âme avec Dieu, celui qui ne prie que de bouche ne prie pas réellement; c’est pourquoi tous s’appliqueront avec le plus grand soin à prier mentalement plus que vocalement; et afin que selon la doctrine de Jésus-Christ, cet excellent Maître, ils adorent le Père Éternel en esprit et en vérité 11, ils s’efforceront d’éclairer leur entendement et d’embraser leur coeur d’ardentes aspirations, plus que d’articuler des paroles.
(61) Que les Supérieurs veillent à ce que tous les religieux, y compris ceux qui demeurent dans les hospices, puissent prendre part aux exercices spirituels, qui se doivent faire chaque année dans nos couvents. Si quelqu’un ne pouvait les suivre, le Supérieur pourvoira à ce qu’ensuite il les fasse en particulier 12.
(62) Attendu que notre séraphique Père, dont l’attachement à la foi catholique se montre si clairement au commencement et à la fin de sa Règle, exige que nous ayons une vénération toute particulière pour le Pontife Romain comme Vicaire sur terre de Jésus-Christ notre Seigneur et que nous portions le plus grand respect à tous les prélats et à tous les prêtres; outre les prières qui se font en commun, que tous les Frères, en leur particulier, adressent à la divine Bonté de ferventes oraisons pour la prospérité de l’Église militante, et pour le Souverain Pontife, afin qu’elle lui donne la grâce de connaître clairement, de vouloir efficacement et d’opérer puissamment tout ce qui peut contribuer à l’honneur et à la gloire de la divine Majesté, au salut du peuple chrétien, à la conversion des hérétiques et des infidèles; qu’ils prient aussi pour tous les Cardinaux de la sainte Église Romaine, pour les Évêques et les prélats en communion avec le Saint-Siège, les rois, les princes chrétiens, les chefs suprêmes des états, pour tout le monde enfin, surtout pour nos Supérieurs et pour nos bienfaiteurs, envers qui nous avons des obligations si étroites.
(63) Un de nos Frères venant à mourir, que tous les autres s’empressent avec une affectueuse charité de recommander son âme à Dieu. Et afin que l’on ait une règle certaine au sujet des Suffrages à appliquer à nos défunts, nous ordonnons qu’à la mort du Ministre ou de l’Ex-ministre général, du Procureur ou de l’Ex-procureur général, on récitera au choeur, dans tous nos couvents, l’Office des morts, et qu’on célèbrera pour eux une Messe solennelle; tous les prêtres leur appliqueront trois Messes, en outre les clercs et les laïcs trois Communions, les clercs diront trois fois l’Office des morts et les laïcs trois cents Pater Noster. Pour les Définiteurs et Ex-définiteurs généraux, tous les prêtres diront une Messe, les clercs réciteront l’Office des morts, les laïcs cent Pater noster, et les uns et les autres feront la sainte Communion. Dans chaque Province le triple suffrage de Messes, d’Offices, de Pater noster et de Communions sera appliqué aux Ministres et Ex-ministres provinciaux. Pour les autres religieux décédés, même pour les novices 13, tous les prêtres leur appliqueront une Messe, les clercs et les laïcs une Communion, et en outre les premiers réciteront l’Office des morts et les seconds cent Pater noster. Toutefois le Chapitre provincial peut amplifier ces Suffrages pour toute la Province. Chaque année, le lendemain de la fête de notre Père saint François, ou le premier jour libre si celui-ci était empêché, cette époque nous paraissant la plus convenable et la plus propre pour obtenir de Dieu la délivrance de leurs âmes, on célèbrera, dans toutes les églises de notre Ordre, en se conformant aux rubriques, un Anniversaire, avec Office et Messes pour tous nos Frères défunts.
(64) À la mort du Souverain Pontife, on récitera pour lui, dans toutes nos maisons, l’Office des morts, et on célèbrera une Messe solennelle; chaque prêtre dira une Messe, les clercs et les laïcs feront la sainte Communion, en outre les clercs réciteront l’Office des morts et les laïcs cent Pater noster. À la mort du Cardinal Protecteur on dira pour lui dans toutes nos maisons l’Office des morts et on célèbrera une Messe solennelle; les laïcs réciteront cent Pater noster et feront la sainte Communion, ainsi que les clercs.
(65) On ensevelira les religieux en quelque lieu décent, et à cet effet, lorsqu’on pourra facilement le faire, on construira une chapelle dans l’enceinte du couvent pour la sépulture des Frères 14, avec un autel pour y célébrer la sainte Messe 15. Là où les lois civiles ne permettent pas d’inhumer dans nos maisons, que les Supérieurs s’efforcent d’obtenir, dans les cimetières publics, un endroit séparé pour la sépulture de nos Frères 16.
(66) Le silence étant regardé comme le meilleur soutien de l’esprit intérieur, et puisque, comme le dit saint Jacques, Celui qui ne sait pas mettre un frein à sa langue n’a qu’un vain fantôme de religion 17, nous ordonnons que le silence évangélique, autant que le comporte notre fragilité, soit continuellement observé; car, selon l’oracle infaillible de Jésus-Christ, nous aurons à rendre compte, au jour du jugement, de toutes les paroles inutiles 18. Si grands sont les biens dont Dieu nous comble, depuis que nous nous sommes consacrés à son divin service, qu’on ne saurait traiter de léger manquement les conversations que nous tiendrions sans motif raisonnable sur les choses du monde.
(67) Quant au silence régulier, on le gardera inviolablement à l’église, au choeur, à la sacristie, au dortoir, où il ne sera jamais permis de parler sans nécessité; quand il sera nécessaire de parler, on le fera à voix basse et en peu de mots. Au réfectoire, on le gardera depuis le premier signal de la table jusqu’après l’action de grâces. Pour règle générale en chaque maison on doit donner le signal du silence après le dîner, à une heure convenable. c’est-à-dire à la fin de la récréation, et le garder jusqu’après les Vêpres; pareillement que tous l’observent depuis le soir jusqu’au lendemain matin après la Messe conventuelle. Si quelqu’un venait à le rompre, il dira cinq Pater noster et cinq Ave Maria, au réfectoire, les bras en croix. Nous recommandons aux Frères de contracter l’habitude de parler toujours et partout religieusement et à voix basse, le défaut contraire étant souverainement déplacé chez une personne religieuse.
(68) Pour réprimer les révoltes de la chair contre l’esprit et la soumettre absolument à son empire, et encore en mémoire la très douloureuse Passion de notre très doux Sauveur, surtout de sa sanglante flagellation, nous voulons qu’on ne manque pas de faire la discipline habituelle tous les lundi, mercredi et vendredi, même aux plus grandes solennités; qu’on la fasse à l’heure accoutumée. Pendant la Semaine Sainte, on la fera tous les jours. Les Frères doivent, pendant ce saint exercice, se pénétrer affectueusement du souvenir de l’aimable Jésus, Fils de Dieu, lié à la colonne et s’efforcer de ressentir en eux-mêmes une légère partie de ses souffrances. En la faisant, on récitera le Miserere, le De Profundis, l’antienne Christus factus est pro nobis obediens, avec l’oraison Respice, ensuite le Salve Regina, suivi du verset et de cinq oraisons, et enfin un Pater noster et un Ave Maria.
(69) L’abstinence, l’austérité et la mortification étant si hautement louées, surtout dans la vie des Saints, nous conjurons les Frères, qui, à l’exemple du Christ notre Seigneur et de saint François, ont choisi la voie étroite, d’observer les saints Carêmes que notre séraphique Père avait coutume de faire, spécialement celui de la Bénédette. On ordonne en outre que, pendant toute l’année, on ne mangera pas de viande le mercredi ni le samedi, ou tout au moins l’un de ces deux jours. Suivant l’usage, les Frères jeûneront la veille des fêtes de notre Père saint François et de l’Immaculée Conception de la Très Sainte Vierge. Et si quelqu’un avait l’habitude de ne pas observer les jeûnes de l’Eglise ou de la Règle, ainsi que l’abstinence, qu’il soit privé de voix active et passive pendant deux ans, et même puni plus sévèrement, si la gravité de la faute le demande.
(70) Aux temps et aux jours où les Frères sont obligés au jeûne, même par précepte de la Règle, ils peuvent, quant à la quantité et à la qualité des aliments, se conformer aux lois de l’Église 19 ou aux indults particuliers accordés par le Saint-Siège aux Pays où ils se trouvent, ainsi qu’aux coutumes locales approuvées. Pour sauvegarder l’esprit de mortification, on ne servira à table que les mets suffisants et conforme à notre état, nous persuadant bien que peu de chose suffit à la nécessité et que rien ne peut contenter la sensualité. En signe de pauvreté on ne mettra pas de nappes sur nos tables, mais on donnera seulement une serviette à chaque religieux.
(71) Afin que nos coeurs, selon la doctrine de notre Très Saint Sauveur, ne se laissent point appesantir par l’excès du boire et du manger 20, mais que nos âmes soient libres et nos sens mortifiés, nous défendons de servir à table du vin violent, qui ne soit discrètement trempé; ce qui nous paraîtra encore recherché, si nous pensons que, selon le témoignage de saint Jérôme, les moines de son temps, même les plus débiles, ne buvaient que de l’eau 21, et que notre Père saint François, ainsi que le rapporte le séraphique Docteur saint Bonaventure, n’osait pas méme boire l’eau nécessaire pour calmer l’ardeur de sa soif 22. Nous y trouverons même de la douceur, quand nous nous rappelerons qu’on refusa de l’eau à Jésus-Christ suspendu à la croix, et qu’il n’y reçut pour breuvage que du fiel et du vinaigre 23. Nous défendons aussi de servir à table rien de particulier, excepté pour les malades, les voyageurs, les vieillards et ceux qui seraient faibles et languissants. Si quelque Frère voulait s’abstenir de vin, de viande, d’oeufs, ou d’autres mets, ou faire des jeûnes extraordinaires, son Supérieur, loin de s’y opposer, l’encouragera à persévérer, pourvu néanmoins qu’il n’y voie aucun inconvénient pour lui, qu’il le juge animé d’une intention droite et pure, et que ce religieux mange à la table commune.
(72) Pendant le temps des repas, après la lecture de la sainte Écriture, ou de la Règle séraphique, on lira quelque autre livre de piété, afin que l’âme, autant et plus que le corps, reçoive ainsi sa nourriture, et s’anime davantage à suivre Jésus crucifié. Aucun Supérieur local ne peut dispenser de la lecture et du silence suivant son bon plaisir, mais il ne le fera que rarement et pour des motifs raisonnables; celui qui fera le contraire sera corrigé et puni par le Supérieur provincial.
(73) Que les Supérieurs se gardent d’admettre aucun séculier à manger au réfectoire avec les religieux, à moins que, dans un cas extraordinaire, on ne puisse s’en dispenser sans inconvénient et sans causer un fâcheux étonnement; dans ce cas on aura soin de le traiter avec la simplicité convenable à notre état, n’omettant ni les lectures ni les cérémonies accoutumées.
(74) Nul religieux ne pourra prendre de repas, soit au dedans, soit au dehors de nos maisons, sans la permission et la bénédiction du Supérieur.
(75) Comme il est facile de contracter des souillures spirituelles quand on se plaît dans les fêtes du monde, nous défendons aux Frères d’y assister, si ce n’est pour y annoncer la parole sainte, ou rendre d’autres services spirituels. Étant, selon le grand Apôtre 24, en spectacle au monde, aux Anges et aux hommes, ils doivent s’efforcer, par la sainteté de leur vie, de donner des exemples propres à faire glorifier Dieu.
(76) Les Supérieurs doivent user de prudente sévérité, quand il s’agit de concéder aux religieux des lettres d’obédience pour entreprendre des voyages qu’il est difficile de faire sans dépenses et sans détriment de la vie spirituelle, sans étonnement des séculiers, ni sans troubler la discipline régulière. Et qu’ils se montrent également sévères et prudents même quand il s’agit de pèlerinages. Et pour que tout se fasse avec ordre, nous prescrivons qu’aucun religieux n’entreprenne un voyage quelconque sans nécessité ou raison suffisante, et sans une lettre d’obédience; et que le voyage ne dépasse ni en étendue ni en durée la limite fixée. Ces lettres doivent être munies du sceau du Supérieur respectif, et à cette fin, que toutes nos maisons aient leur sceau particulier, selon l’antique usage.
(77) Nous déclarons que le Supérieur local ne peut donner l’obédience à ses sujets que pour se rendre dans la maison la plus rapprochée de la Province. Le Supérieur provincial peut la donner à tous ses religieux non seulement pour toutes les maisons de la Province, mais encore pour la plus rapprochée d’une Province limitrophe, pourvu que la distance n’excède pas cent kilomètres.
Enfin le Ministre général peut la donner à tous sans exception pour n’importe quelle Province ou maison. On détermine encore que les lettres d’obédience seront, pour l’ordinaire, demandées au Supérieur provincial par l’entremise du Supérieur local et au Ministre général par celle du Supérieur provincial; et celui qui fera le contraire ne sera nullement écouté, mais repris suivant la gravité de la faute.
Les obédiences, sauf en quelque cas particulier, doivent être envoyées directement non aux sujets, mais à leurs Supérieurs respectifs et elles sont de nul effet, si elles n’ont été exécutées dans les deux mois à partir de leur date, ou de l’époque fixée dans leur teneur. Les religieux qui fausseraient ou contreferaient les lettres d’obédience, qui imiteraient la signature des Supérieurs ou se serviraient de leur sceau, seraient en punition retenus dans le couvent, pendant une durée proportionnée à la gravité de leur faute 25.
(78) Que les Frères, à moins d’un motif raisonnable, surtout quand il s’agit de la modeste récréation en usage parmi les religieux, ne sortent point seuls, mais à l’exemple des disciples de notre divin Sauveur, qu’ils aillent avec un compagnon 26. Et le long du chemin, qu’ils prennent bien garde de se séparer ou quereller, mais qu’en toute charité et humilité, à l’exemple du Christ béni 27, chacun s’efforce d’obéir à son compagnon et de le servir, se considérant les uns les autres comme frères en Jésus-Christ. Et au besoin, qu’ils se fassent entre eux la correction fraternelle, et s’ils n’en profitent pas pour leur amendement, qu’ils découvrent réciproquement leurs défauts à leurs Supérieurs 28.
(79) Tous les religieux, lorsqu’ils seront obligés de sortir, pour quelque raison que ce soit, outre la permission requise, demanderont à genoux la bénédiction du Supérieur, ce qu’ils observeront pareillement à leur retour; et tous les Frères s’appliqueront à éviter les sorties inutiles et frivoles. Les quêteurs surtout, qui, en raison de leur office, ont plus de relations avec le monde, se garderont de faire des visites sans but et d’avoir avec les séculiers de longues conversations; qu’ils ne sortent pas de la maison, si ce n’est par nécessité ou pour remplir leur office. Ils s’efforceront alors, par la réserve de leurs paroles et de leur maintien, de donner à tous le bon exemple et de se concilier, ainsi qu’à la religion, la pieuse affection des séculiers 29.
(80) Comme notre séraphique Père saint François nous déclare, dans son Testament, lui avoir été révélé de Dieu que nous devons, à l’exemple du Christ, saluer en disant : Le Seigneur vous donne sa paix 30, nous voulons que les Frères se servent de cette salutation évangélique ou de quelque autre pieuse et dévote formule.
(81) Attendu que les vrais Frères Mineurs doivent, avec une vive confiance, se tenir sous la dépendance de leur très bon Père céleste, le Père des miséricordes, il leur est enjoint, selon le conseil de Jésus-Christ, de ne porter, sans nécessité, aucune provision dans leurs voyages, surtout si les endroits qu’ils parcourent sont peu éloignés les uns des autres, et si les habitants sont traitables, bienveillants et amis de la religion; remettant ainsi le soin d’eux-mêmes à Dieu qui nourrit non seulement les animaux, mais encore ceux qui ne cessent de l’offenser 31.
(82) Nous défendons en outre aux religieux de s’arrêter, sans une grande nécessité, pour manger ou pour coucher dans les villes ou bourgades proches de nos maisons. En arrivant dans les lieux où nous sommes établis, que personne n’ose entreprendre aucune affaire quelconque, avant de s’être présenté au Supérieur, ni se permettre de manger ou de coucher chez les séculiers, même parents, sans avoir obtenu son autorisation, qu’il n’accordera que difficilement 32. La même chose s’observera au départ, et ceux qui violeront cette défense seront admonestés et punis selon la gravité de la faute. A leur arrivée dans nos maisons, les Frères, comme de vrais enfants du Père céleste, visiteront d’abord l’église, et, après une adoration et une prière, ils iront se présenter au Supérieur et lui montreront leur obédience.
(83) L’exercice de l’hospitalité ayant mérité à quelques anciens Patriarches de recevoir des Anges 33, on ordonne qu’il y ait dans toutes nos maisons un frère, chargé du soin de recevoir les étrangers, avec toute la diligence et la charité possible. A l’exemple du très humble Fils de Dieu 34, il leur lavera les pieds, s’il est opportun de le faire, en récitant quelques psaumes ou cantiques spirituels, se regardant toujours comme un serviteur inutile, lors même qu’il ferait tout le bien dont il est capable.
(84) On n’aura dans nos maisons aucune bête de somme pour servir de monture; au contraire nous recommandons instamment à tous les Frères de se souvenir du précepte de notre Règle, qui défend d’aller à cheval, et de faire leurs voyages à pied, à l’exemple de Jésus-Christ et de saint François, son fidèle imitateur. Celui qui irait à cheval sans manifeste nécessité, sera puni par le Supérieur provincial, selon la gravité du délit. L’usage du chemin de fer n’est point pour cela défendu, pourvu que, comme pour l’usage de la voiture, il y ait une cause raisonnable de s’en servir, la permission des Supérieurs, et que la classe choisie ne blesse pas l’humilité 35. C’est aux Supérieurs de juger si le motif est suffisant, et les Frères pourront, en toute sûreté de conscience, s’en remettre à leur jugement.
Cfr. can. 610.1. ↩︎
Mat. 15:8. ↩︎
Jérém. 48:8. ↩︎
Can. 595.1, n. 2. Cfr. can. 610.2. ↩︎
Can. 595.2. ↩︎
Can. 1265.1, n. 1 et 1267. ↩︎
Can. 1268-1271. ↩︎
Can. 125, n. 2. Cfr. can. 592. ↩︎
Can. 125, n. 2. Cfr. can. 592. ↩︎
Cfr. can. 595.1, n. 2. ↩︎
Jean 4:24. ↩︎
Can. 595.1, n. 1. ↩︎
Can. 567.1. ↩︎
Can. 1208.2. ↩︎
Cfr. can. 1190, 1194 et 1202.2. ↩︎
Cfr. can. 1209.2. ↩︎
Jacques 1:26. ↩︎
Mat 12:36. ↩︎
Can. 1251. ↩︎
Luc 21:34. ↩︎
Epistol. XXII ad Eustoch. De custod. virg. ↩︎
Legenda S. Francisci, c. V, 1. ↩︎
Mat 27:48. ↩︎
1 Cor. 4:9. ↩︎
Cfr. can. 2362. ↩︎
Clément VIII, De reformat. Regularium, 25 juin 1599, n. 19. ↩︎
Mat. 20:28. ↩︎
Hugues de S. Victor, Exposit. in Regul. S. August., c. VII. ↩︎
Cfr. can. 624. ↩︎
Mat. 10:12; Luc 10:5. ↩︎
Mat. 5:45; Luc 12:6. ↩︎
Cfr. Reg. S. Benedicti, c. II. ↩︎
Gen. 18:2; 19:1. ↩︎
Jean 13:5. ↩︎
S. Cong. Episc. et Regul., 19 juin 1863 et 21 juil. 1876. ↩︎